OWNI http://owni.fr News, Augmented Tue, 17 Sep 2013 12:04:49 +0000 http://wordpress.org/?v=2.9.2 fr hourly 1 La performance du FN piège les partis républicains http://owni.fr/2011/03/21/elections-cantonales-fn-front-national-piege-partis-republicains/ http://owni.fr/2011/03/21/elections-cantonales-fn-front-national-piege-partis-republicains/#comments Mon, 21 Mar 2011 15:27:37 +0000 Eric Dupin http://owni.fr/?p=52530 Les absents ont toujours tort. La règle vaut aussi en matière électorale. Une majorité de Français appelés dimanche aux urnes pour le premier tour des cantonales a manqué à l’appel. Le taux d’abstention, de 55,6%, a battu tous les records pour ce type de scrutin. Mais saluons aussi le civisme de la petite moitié du corps électoral qui a participé à une compétition négligée par la plupart des médias et privée d’enjeux palpables…

Plutôt que de faire parler des abstentionnistes dont le message est, par définition, assez confus, écoutons donc ces courageux électeurs. Leur vote exprime l’état d’esprit de la partie politiquement la plus mobilisée de la population. Une indication qui n’est pas négligeable à un an de l’élection présidentielle de 2012 où le camp le plus vaillant disposera d’un avantage décisif.

Effondrement de l’UMP

L’identité du principal perdant de ce premier tour ne fait aucun doute. Tout l’art des additions du ministre de l’Intérieur n’y changera rien : le parti présidentiel essuie un échec humiliant. Avec 17,1% des suffrages exprimés, les candidats de l’UMP enregistrent un résultat exceptionnellement faible pour un parti au pouvoir. La chute est d’environ quatre points par rapport au premier tour des cantonales de 2004 . L’électorat populaire l’a quitté. Au total, la droite modérée doit se contenter de 31,9% des voix, ce qui n’a rien de glorieux et augure mal, pour elle, des prochaines échéances.

Le froid verdict des chiffres est également sévère pour le Modem qui ne recueille que 1,2% des suffrages, soit une baisse de trois points par rapport au score de l’UDF d’il y a sept ans. Dans un contexte de très vive hostilité à l’encontre du pouvoir, le résultat du principal parti d’opposition n’est pas non plus très glorieux. Avec 25% des voix, le PS ne retrouve pas, à un point près, son résultat de 2004. La performance n’est pas fameuse pour ce parti d’élus généralement à l’aise dans les élections locales. Mais le Front de gauche s’en tire un peu mieux avec 9% des voix (plus un point).

Les socialistes ont vraisemblablement subi la concurrence de candidats écologistes à l’offensive. Rassemblant 8,3% des suffrages exprimés, ceux-ci progressent de quatre points au regard du scrutin de référence. Mathématiquement, ce sont les écologistes – qui ont pu être portés par le contexte du drame nucléaire japonais – qui apparaissent comme les premiers vainqueurs de ce scrutin. Politiquement, c’est autre chose. Le Front national ne gagne, lui, que trois points mais son score national de 15,2% représente un succès qui ne doit pas être sous-estimé. Soulignons que ce progrès est mesuré par rapport à sa performance aux cantonales de 2004, lorsque le FN était porté par son succès du 21 avril 2002. Aux cantonales de 2008, ce parti n’avait recueilli que 4,8% des voix. C’est dire si le redressement est vigoureux.

Un Front nationalisé

Parti encore mal organisé, le FN n’était présent dimanche que dans 71% des cantons. Son score national est énorme pour une formation totalement dénuée d’implantation cantonale. L’extrême droite ne dispose d’aucun conseiller général sortant. Là où il participait à la compétition, son pourcentage est d’environ 20% des suffrages exprimés. Cela ne signifie pas que son audience nationale est d’un tel niveau dans la mesure c’est généralement dans ses zones de faiblesse que le FN n’avait pas réussi à présenter de candidat.

Ses résultats n’en sont pas moins impressionnants dans des régions qui étaient autrefois des terres de mission pour l’extrême droite. C’est le principal enseignement du scrutin de dimanche. Le vote frontiste s’est désormais largement nationalisé, avec des avancées notables dans une France rurale qui a cessé d’être paysanne pour héberger une large fraction des classes populaires .

Les départements traditionnellement modérés et conservateurs de l’Ouest, naguère rétifs aux séductions lepénistes, accordent ici ou là de beaux résultats au FN. Dans le canton rural d’Allonnes, en Maine-et-Loire, son candidat obtient ainsi 22,7% des voix. Citons encore le canton de Château-la-Vallière en Indre-et-Loire (21,1%) ou celui de Sainte-Mère-l’Eglise dans la Manche (22,3%). En Ile-et-Vilaine, ce parti n’était présent que dans un quart des cantons. Mais dans deux cas sur six, il a réussi à être qualifié pour le second tour.

Le FN retrouve encore des couleurs dans ses bastions un moments perdus. A Vitrolles (Bouches-du-Rhône), son candidat est en ballottage contre celui du PS avec 28,2% des voix. Il est en tête à Nice 10 (Alpes-Maritimes) avec 33,7%. Même position à Calais-centre (Pas-de-Calais) où son score est de 26,9%. Le Front de Marine Le Pen ne retrouve pas l’audience de celui de son père en Seine-Saint-Denis même s’il se redresse là aussi. Mais il cartonne dans la France pavillonnaire de la Seine-et-Marne. Dans le département de Jean-François Copé, le FN devance à la fois l’UMP et le PS. Il enregistre aussi des résultats flatteur dans les régions en proie à la désindustrialisation du nord-est de la France. A Saint-Dizier-Ouest (Haute-Marne), ville en lutte contre le déclin démographique, le candidat frontiste culmine à 38% des voix. C’est toute une partie de la France qui souffre qui regarde aujourd’hui du côté du Front national.

Le dilemme du « front républicain »

Arrivé en tête dans 39 cantons, le FN sera présent au second tour dans pas moins de 399 compétitions. Ces duels insolites, qui opposeront dans la moitié des cas une candidat d’extrême droite à un socialiste, posent de redoutables problèmes à la classe politique.

Pour être parée de vertus morales, la stratégie dite de « front républicain » (appels de la droite ou de la gauche à voter pour son adversaire face au FN) n’est pas sans inconvénients. Elle offre, en effet, à la formation lepéniste un avantage symbolique de poids : celui de pouvoir faire la démonstration qu’il est le seul véritable adversaire de partis de gouvernement finalement complices. L’argument de l’union sacrée anti-fasciste perd quelque peu de sa force de conviction dés lors que Marine Le Pen prend soin d’éviter le dérapages sulfureux de son père et tient un discours qui n’est pas celui de l’extrême droite traditionnelle.

Le refus de l’UMP de choisir la stratégie du « front républicain » ne s’explique toutefois pas principalement par ce type de considérations. Le parti sarkozyste est d’abord soucieux de ne pas se couper d’électeurs frontistes dans la perspective de la prochaine compétition présidentielle. Le président sortant escompte visiblement un bon reports des voix du FN au tour décisif. D’où l’impératif de ne pas braquer cette partie du corps électoral. Les socialistes ne sont pas prisonniers de pareils calculs. Ils ont, à l’inverse, tout intérêt à défendre une ligne qui isolerait la droite de son extrême.

>> Illustrations CC flickr Clementine Gallot ; staffpresi_esj

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La France a mal à sa liberté d’expression http://owni.fr/2010/03/25/la-france-a-mal-a-sa-liberte-d%e2%80%99expression/ http://owni.fr/2010/03/25/la-france-a-mal-a-sa-liberte-d%e2%80%99expression/#comments Thu, 25 Mar 2010 15:34:21 +0000 Ulrich http://owni.fr/?p=10887 3111207407_d7b10c180a_o

Depuis plusieurs mois, je constate qu’un thème revient plusieurs fois sur le devant de la scène, en France: celui de la liberté d’expression.

J’observe, du haut de ma chaire d’expatrié volontaire, que ce débat n’est qu’un des nombreux symptômes d’une France et de ses habitants en proie à un affreux doute.

Le débat sur l’identité nationale en est une des manifestations, ses abstentions records à chaque élection un autre et ce vieux serpent de mère qu’est la liberté d’expression alimente régulièrement ce vieux fond de pot. Les français ont aussi cette incroyable faculté à cristalliser leurs passions sur des détails et à s’enflammer dès que l’un d’entre nous se mouche de travers.

L’affaire Frêche en est un exemple et le futur possible limogeage de Zemmour/Guillon, un autre. J’ai constaté aussi, qu’en France, on aime beaucoup juger les gens à l’aune des petites phrases sorties de leurs contextes. Est-ce un vieux réflexe hérité de la Révolution Française, lorsque le jury populaire fut institué ?

En tout cas, une chose est certaine, celui sur la liberté d’expression est un débat qui remonte aux calendes grecques, depuis le jour où deux pays, en très peu de temps, l’inscrivirent l’une dans sa constitution et en fit son premier amendement et l’autre dans une charte des droits de l’homme.

De part et d’autres de l’Atlantique, deux pays se firent le garant de la liberté d’expression et s’inscrivent historiquement, avec tout le poids de la légitimité, dans un débat continuel. Cependant, le concept de la liberté d’expression ne prit pas le même chemin en France et aux Etats-Unis. Deux tendances se sont toujours affrontées et si aux Etats-Unis, l’une s’inscrivit durablement, ce fut en France une toute autre affaire.

Deux conceptions différentes

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Nul besoin de répéter que la liberté d’expression est un de nos droits fondamentaux. Dans nos pays occidentaux, ce droit n’est guère remis en cause, il s’est inscrit dans notre ADN. Mais est-ce un droit absolu ? Poser ainsi le débat sur la liberté d’expression prend un tout autre sens.

Pour la défense de ce droit, deux camps se sont toujours opposés. Et il faut remonter à la Révolution Française pour en connaître l’origine. Les français ne se doutent pas (du moins, plus) que la rédaction de la déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen fut l’objet d’âpres débats au sein de la Constituante.

Ce fut le premier travail de l’Assemblée Nationale. Les travaux commencèrent le 09 juillet 1789, le texte fut voté le 26 août mais ne fut ratifié que le 5 octobre par Louis XVI sous la pression populaire et entra en vigueur que le 3 novembre. L’un des débats les plus soutenus fut celui autour de la liberté d’expression.

D’un côté, Emmanuel-Joseph Sieyès, que les français ont certainement oublié, mais qui est l’une des figures marquantes de la Révolution Française, puisqu’il écrivit le texte fondateur « Qu’est-ce-que le Tiers Etat ? » et fut le rédacteur du serment du Jeu de Paume ; de l’autre, Marat et Robespierre qu’on ne présente plus.

Sieyès voulait que la liberté d’expression soit limitée et encadrée par la Loi ; Marat et Robespierre estimaient, au contraire, qu’elle devait être indéfinie et illimitée, rejoignant ainsi le combat de Voltaire. La motion supportée par les partisans de Sieyès l’emporta et s’inscrivit dans l’article 11 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen :

La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l’Homme : tout Citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l’abus de cette liberté, dans les cas déterminés par la Loi.

En clair, ma liberté d’expression s’arrête là où commence celle des autres.

Contrairement, aux Etats-Unis, où l’on conçoit facilement qu’on puisse laisser le Klux Klux Khan avoir pignon sur rue et en même temps, mettre le combat pour les Droits Civiques au cœur des préoccupations citoyennes, on constate que les américains sont farouchement attachés à cette liberté qui est pour eux le dernier rempart contre toutes formes de tyrannie. Dans sa préface à l’essai de Noam Chomski,  De la guerre comme politique étrangère des Etats-Unis, Jean Bricmont expliquait parfaitement cette différence entre la position Sieyès et celle américaine, soutenue par le même Chomski.

En France, cette liberté d’expression (« ce pragmatisme libertaire et économique ») a du mal à trouver un écho. Il y a même une certaine hostilité à imaginer que l’on puisse dire tout et son contraire.

Les crispations françaises

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Qu’en 2010, on puisse encore lire dans la presse, sur Internet que la liberté d’expression est en danger, démontre bien que les français ne sont pas fondamentalement à l’aise avec cette liberté d’expression, telle qu’elle a été définie depuis plus de 200 ans. Elle se manifeste par une crispation permanente des acteurs et des citoyens sur le sujet, à chaque fois qu’une personnalité est supposée avoir dit quelque chose qui heurte une sensibilité.

Malheureusement, là où Sieyès s’est quelque peu fourvoyé, c’est la propension des français à se confronter, violemment ou pas, sur tout et n’importe quoi et à donner une valeur morale à la liberté d’expression. Cette notion du bien et du mal pourrit le débat en France. A ce jeu pervers des petites phrases, brandir d’un côté la liberté d’expression et de l’autre, le Droit, permet d’évacuer à grands seaux d’eau le débat d’idées. Cette morale à la française leur interdit de concevoir le débat et l’échange des idées, dans un cadre serein.

Oui, Guillon et Zemmour ont le droit de dire ce qu’ils ont dit. Quels contre-arguments peut-on leur opposer sans que ça ne devienne une foire d’empoignes et sans que le poulailler des bien-penseurs monte sur ses ergots et agite le chiffon rouge de la Loi ?

Oui, Frêche a le droit de dire ce qu’il pense sur les Harkis, Fabius, etc. La réaction intelligente aurait été de lui opposer un débat, au lieu de crier haro sur le baudet.

Que nous soyons d’accord ou pas, nous perdons en n’écoutant pas les gens. Généralement, les tenants de la ligne Sieyès donnent rarement une réponse claire à cette question fondamentale : encadrer la liberté d’expression, interdire certains propos, soit, mais à partir de quels critères et quoi ? Quels motifs invoque-t-on ? Au regard ce qui se passe en France, ces derniers temps, ce serait la nocivité du discours et le caractère odieux des propos ? Jean Bricmont et Noam Chomski apportent des réponses des plus éclairantes à ces questions. Il est temps de les lire et les relire.

> Article initialement publié sur l’ndividu Incertain

> Illustrations par yoshiffles par Walt Jabsco et par  [nati]

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Youpi! Ils ont gagné? http://owni.fr/2010/03/22/youpi-ils-ont-gagne/ http://owni.fr/2010/03/22/youpi-ils-ont-gagne/#comments Mon, 22 Mar 2010 16:13:22 +0000 Emgenius http://owni.fr/?p=10632

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Un discours de triomphe modeste, mais un discours de triomphe quand même.

Ainsi donc, comme en 2004, la plupart des régions sont restées colorées de rouge. Et depuis hier les ténors avec ou sans twitter, de nous marteler qu’il s’agit d’un vote sanction de la politique du gouvernement à la tête de la république française.

Je n’ai pas voté pour la région île de France où je réside. Je ne peux pas. Je ne suis pas Français (un choix de fainéant, depuis que mon pays de racines, la Belgique a autorisé il y a six mois la double nationalité à ses ressortissants). J’ai entendu les arguments balancés par les futurs votants et les abstentionnistes dans #lafrancedutrain qui m’emmène chaque matin de Seine et Marne à Paris. On y parlait de la personnalité bonhomme de Huchon et du sourire coquin de Valérie Pécresse. Ou alors on parlait des résultats désastreux de Paris en championnat ou on ne parlait pas.

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J’ai reçu des tracts de Jean Paul Huchon à ma gare d’extrême Seine et Marne. J’ai vu aussi des poubelles pleines des mêmes tracts quelques mètres plus bas, dans le couloir qui mène au train. J’ai lu les batailles à coup de Ali Soumaré, les déclarations facebook de Frédéric Lefèbvre, j’ai entendu le triomphalisme de gauche demander la tête de François Fillon entre les lignes. Et si c’était Jean-Marie Le Pen qui avait eu la seule bonne analyse du scrutin en version 2010 « Le Pen, c’est une bonne marque, en laquelle les gens ont confiance ».

Et si le vote sanction, le vote épidermique qui permet d’excuser sinon d’expliquer les revirements complets de l’opinion publique n’étaient en fait que le reflet du monde contemporain ?

Combien sont-ils, les petites gens à mon image ? Ceux qui luttent autant pour le pouvoir d’achat au quotidien que pour l’écran plat ? Ceux qui ne noieraient pas leur prochain dans l’eau d’un bain de merde, mais seraient prêts à gueuler si les voisins se mettent à marcher sur les plates bandes ? Combien sommes-nous à conchier  les extrêmes de tout bord sans pour autant soutenir d’idéal ni de droite ni de gauche. Combien sommes-nous à voter, ou ne pas voter, par habitude ?

Parce que les préoccupations politiciennes nous semblent à ce point éloignées de nos quotidiens que nous avons l’étrange impression qu’un système vaut bien l’autre. Qu’on ne sera jamais tous frères unis sous le drapeau rouge, mais pas dupes non plus de lois votées au profit de certains, sous le couvert de la réponse à un fait divers, une préoccupation sociale. Et je me souviens à 17 ans, de ce gros couillon qui fustigeait ses camarades de classe donnant leur vote à la pensée paternelle sans réfléchir à l’idéologie, au monde qu’ils désiraient pour plus tard. Je suis pire qu’eux. J’ai abdiqué. Je survis. J’envie. Je possède et constate.

L’économie quotidienne. La tambouille dans la gamelle de tous les jours et l’hédonisme capitaliste ont depuis longtemps remplacé notre préoccupation politique.

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On veut tous plus. On veut tous mieux. Et tant pis si parfois on doit faire taire l’internationale socialiste qui chante au fond de nos cœurs. Les vacances aux Maldives valent bien quelques grammes de C02, et on ne se priverait pas du café à la machine parce qu’il est servi dans un gobelet plastique. On veut bien être un peu justes, mais pas jusqu’au point de partager nos appart’s avec tous les miséreux du monde. On veut bien accueillir les réfugiés politiques, mais à la seule condition qu’ils n’habitent pas à 15 dans la maison mitoyenne, qu’ils évitent les ablutions matinales sonores et les odeurs de friture insupportables. On veut bien être socialistes, mais pas au point de nourrir tous les tire au flanc, que parfois on envie, le soir quand on est crevé par la journée de boulot, la grève SNCF ou le trafic à la sortie de la méga-ville.

La politique n’est plus au mieux, qu’un outil de notre développement personnel. Au pire une habitude ou un sujet de conversation. Nous sommes volatiles, changeants, inconsistants. Nous sommes capables de sacrifier un idéal au gré de notre ambition personnelle. Nous sommes près à tous les compromis parce qu’ils servent notre cause propre ou perpétuent notre consensus mou.

Nous pensons la politique en terme de phrases assassines, de discours grand guignolesques ou de spiritualité sur Twitter.

Un casse-toi pauvre con et nous sommes capables de causer six heures avec nos collègues. Un désir d’avenir et notre journée numérique est enjouée à coup de retweet.

Nous avons la vague impression que quelque chose ne va pas. Nous voudrions que l’île de sacs plastiques au milieu de l’Atlantique soit nettoyée, mais ne serions pas prêts à être taxé pour le nettoyage à sec. Nous votons pour les chaussures de Nadine Morano, la petite marche de Nicolas Sarkozy, la serpillère flasque de Van Rompuy ou le nœud papillon d’Elio di Rupo.

Notre conscience politique se construit autour d’un clip « pour ceux qui veulent changer le monde » et d’un bon mot des guignols. Notre idéologie se développe pour Stéphane Guillon ou contre lui. Nous nous en foutons royalement (sans jeu de mot), tant que rien n’empêche les courses chez H&M, le caddie chez Intermarché et les vacances au mois d’Août.

Nous avons la conscience diffuse que quelque chose ne va pas, ne va plus, n’a jamais été. Cohn Bendit représente la génération de l’échec des idéaux, mais nous n’avons pas d’idéaux. Besson ou Strauss Kahn la preuve qu’on peut être de gauche sans finir professeur d’histoire à collier de barbe. Saint Sega priez pour nous. Et priez, priez que tous nous veuille absoudre.

On aimerait changer le monde, mais notre temps de cerveau disponible est restreint, une fois achevée la lutte pour notre propre survivance et le visionnage de la saison 6 de Docteur House. On aimerait que quelqu’un le change à notre place, par baguette magique et qu’on puisse tous en profiter, y faire des profits. Boire le café à la machine le matin et continuer à respirer correctement, parce qu’on est les pères de nos enfants. On aimerait donner notre destin à un guide, un despote éclairé. Mais on n’a pas confiance en les icônes politiques, qui tournent au vent des électeurs comme des girouettes.

On a l’impression de devoir prendre le destin du monde en main, mais on a déjà du mal à se saisir du nôtre. Et on a peur d’être roulés dans la farine alors on évite de se commettre à adorer une icône politico médiatique qui sera balayée plus tard par une affaire, un revirement ou un mauvais mot glosé par les humoristes.

Nous sommes défiants

C’est là notre seule conscience politique. On sait qu’on ne se fera plus avoir par le politique. Alors on se fait avoir par l’économique. Saint Sega priez pour nous . Et soumets-nous à la tentation. On se rassure en écoutant les radios qu’on imagine colorées à peu près à notre goût et les trublions de bon ton. Nous oublierons. Nous serons prêts à contourner les lois, défier les dogmes si seulement l’économie nous offre une drogue légale. Here we are now, Entertain us, comme disait l’autre.

Parce que quand on se met à penser on pleure. Parce que devant l’ampleur des tâches on se rend compte de nos différends, de nos différences, et de ce qu’on n’aura pas assez d’une vie pour que tout change à notre rythme mollasson.

Nous votons par habitude, ou nous ne votons pas. Ou pire nous votons pour la marque électoraliste qui nous tente le plus. Le Pen a raison (dit comme ça ça fait peur… toi qui pratique la culture de l’extrait remonte plus haut je t’en supplie). Nous choisissons notre préférence électorale plus en fonction des idées, mais en fonction du catalogue, de la vitrine que propose le candidat. Une poitrine avenante, un regard mutin peuvent amener plus de voix qu’un vrai programme dûment calibré. Je vous jure avoir entendu peu avant l’élection de 2007 dans #lafrancedutrain « sarko il gagnera pas, il est trop petit pour faire un président». Quelques bons mots sur Twitter et @benoithamon m’enthousiasme plus que Martine Aubry.

Un site internet pourri ou le rappel opportun d’une opposition ancienne avec le Club Dorothée et c’est une élue de Poitou Charentes qui fait les frais de notre courroux. Un Yann Arthus Bertrand par hasard programmé la veille du scrutin et c’est le monde qui devient écologiste d’un soir. Un policier abattu dans l’exercice de ses fonctions et nous sommes tous profondément convaincus que le monde ne tourne plus rond et qu’il faut resserrer les boulons.

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Quand la victoire est une question de plus’ produit

Nous sommes citoyens d’une méga-ville planétaire. Qu’une explosion se passe sur le pont d’à côté, et nous ne croirons à sa véracité que si le présentateur vedette nous le confirme. Qu’on pense révolution et on se pique de regarder exactement sur quel point de détail du discours de l’UMP on peut porter un estoc parce que sur le fond, on n’est pas si différents. Qu’on soit de gauche et il faut en porter la coquarde : « libé-Guillon-FranceInter » ou de droite « costard, cheveu beatles et microentreprise.

On ne vote plus sur foi d’idées ou de concepts, parce qu’on a la diffuse impression que les concepts ne changent plus le monde et qu’un concept sera toujours moins puissant que l’économie. Et que de l’économie dépend Saint Sega. On vote sur catalogue. On choisit sa marque électorale comme on choisirait un Jean dans un catalogue de La Redoute. Parce qu’il est pas cher, parce qu’il fait le cul rond ou que l’air du mannequin donne envie de lui mettre une cartouche. On applique à notre philosophie, à nos actes, des mécaniques économiques marketing/envie/acte d’achat sensibles aux saisons, à l’ADN de la marque et à la publicité. Notre culture, notre conviction politique est un catalogue France Loisir.

On y picore ce qui nous est bien présenté. Et on s’engage à bien lire chaque mois un morceau de la culture qu’on nous ressemble, que quelqu’un un jour a formaté pour qu’il nous ressemble…. L’économie a non seulement remplacé l’idéal politique, mais il y plaque aujourd’hui ses mécaniques.

Donner des leçons c’est bien…

Mais je n’ai ni le courage ni l’envie de me lancer dans une croisade pour un retour de la prise en main de nos réflexions politiques, pour le retour de la conviction philosophique avant le glamour du glissement du bulletin dans l’urne. Je n’ai pas le temps.

Comme tout le monde je galère d’abord avec l’envie de me payer un resto par mois en famille et des vacances à la côté cet été. Comme tout le monde je m’émeus du ministère de l’identité nationale et m’amuse des spots de campagne blafards du PS. Comme tout le monde si j’allais voter, je choisirais mon candidat sur catalogue (je le fais déjà pour les élus belges que je dois choisir à distance).

Avant j’imaginais que pour éviter que le titanic se mange l’iceberg, il fallait que je grimpe à bord et que je convainque le capitaine. Aujourd’hui je suis plus enclin à rester sur la rive tirer dessus au bazooka, et préparer les chaloupes pour sauver qui pourra. Sauf que… être belliqueux c’est pas classe, et je me vois pas négocier en loucedé l’achat et le montage de mon bazooka. Pas le temps pour ces conneries, y’a Breaking Bad S03E01.

Vivent les régions à gauche ?

> Article initalement publié sur le coin d’Emgenius dans la soucoupe

> Illustrations by mainblanche et par alainalele

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Civisme 2.0: ne pas voter? http://owni.fr/2010/03/15/civisme-20-ne-pas-voter/ http://owni.fr/2010/03/15/civisme-20-ne-pas-voter/#comments Mon, 15 Mar 2010 04:21:13 +0000 Thierry Crouzet http://owni.fr/?p=10077 Pour certains, s’abstenir est un manquement à ses devoirs de citoyen. D’autres estiment au contraire que refuser d’aller voter est une “insurrection civique” (cc Mélenchon). En l’absence d’un quorum, de prise en compte des votes blancs et compte tenu de l’abstention, il nous semble utile d’ouvrir le débat, qui agite aussi l’équipe de la soucoupe…


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Je n’ai pas voté une nouvelle fois et je ne voterai pas tant que la démocratie ne sera qu’un simulacre. J’ai dans Le peuple des connecteurs, et plus tard, exprimé des raisons théoriques pour ne plus voter (impossibilité de prévoir, impossibilité de contrôler la complexité, impossibilité de gouverner…), s’y ajoutent des raisons contestataires. Plus nous serons nombreux à ne pas voter, à refuser de choisir entre imbéciles et andouilles, mieux nous titillerons ceux qui effectuent encore ces choix stupides et qui nient notre liberté de choix. Un jour, un seuil d’abstention sera franchi qui fera s’écrouler un système représentatif exsangue.

Hier, dans le Languedoc, j’ai accompagné ma femme au bureau de vote. Elle a donné sa voix à Europe Écologie, c’est le choix que j’aurais fait si j’y avais été contraint. Non pas pour les plébisciter, mais pour me soustraire à leurs adversaires.

Dimanche prochain, ma femme aussi n’ira pas voter. Comment pourrait-elle choisir entre Frêche (extrême droite de type mitterrandien), UMP (extrême droite déguisée) et FN (extrême droite assumée) ? Elle ne votera pas et je suppose avec elle tous ceux qui ont choisi les Verts, le PS officiel ou la gauche dure. L’abstention devrait être en toute probabilité plus forte dans ma région.

Si les gens avaient du plomb dans la tête, il devrait en aller partout de même. Regardez les chiffres. Vous sommez les voix écologistes et Modem et vous arrivez au score de Bayrou en 2007, autour de 18%. Un hasard ? Je n’y crois pas. Parmi, ceux qui s’expriment, il y a 18 % de gens qui souhaitent une autre forme de politique. Et quand j’entends Cohn-Bendit se situer à gauche, je rigole.

Tu n’as rien compris. Si j’avais voté pour toi, et ma femme a voté pour toi, j’aurais voulu signifier mon rejet de la droite et de la gauche, mon rejet de l’ancien axe d’opposition. Alors quand tu t’allies avec ceux que je rejette, je ne peux pas te suivre.

Je me souviens d’une conversation en juin dernier, sur une terrasse parisienne, avec Sandrine Bélier, toute nouvelle eurodéputée écologiste. Je lui disais alliez-vous avec la gauche et c’est la mort. Elle me jura « jamais ». L’alliance, un an plus tard, vous l’avez déjà faite. Croyez-vous que les gens qui ont pu voter pour vous veulent de cette régression vers un programme commun ? Vous êtes bien comme les autres, seul le pouvoir vous intéresse… et ces petits avantages.

Alors on me dit que ne pas voter favorise le Front national. C’est quoi cette théorie ou plutôt cette rhétorique ? En 2002, au premier tour de la présidentielle : 28 % d’abstention. C’est peut-être beaucoup pour une présidentielle, mais on est loin des 53,5% des régionales 2010. Le Front national ne progresse pas avec l’abstention mais, comme l’abstention, avec l’inanité de nos politiciens. Ne confondons pas les causes et les effets.

Ne pas voter me paraît aujourd’hui la seule manière de militer pour une autre forme de politique. Ne pas voter n’est pas un désengagement, mais un refus des choix restreints qui nous sont offerts. Il faut ajouter au 18 % de ceux qui choisissent la troisième voix peut-être 30 ou 40 % de Français supplémentaires, ceux qui ne votent pas par dégout. La troisième voie est majoritaire en France et elle n’a aucun moyen de s’exprimer, sinon un jour, peut-être, par une insurrection généralisée.

Mais alors pourquoi personne n’arrive à incarner cette troisième voie ? C’est la seule question qui me paraît aujourd’hui intéressante. Bayrou tente et il sombre dans le narcissisme napoléonien. Europe écologie tente et s’acoquine avec la gauche. Rien de surprenant.

Cette troisième voie peut-elle être incarnée par un parti, par des candidats, par un présidentiable ? J’en doute. Si tous ces gens qui ne se reconnaissent plus dans la politique traditionnelle ont développé leur individuation, comme je le suppose, ils ne peuvent plus s’identifier à des totems tutélaires, ces doudous pour adulte, espèces d’individus transactionnels de pacotille.

La représentation absolutiste de nos démocraties n’est plus une forme qui convient à l’homme émancipé du XXIe siècle. Nous devons basculer vers une démocratie distribuée, une démocratie P2P, une démocratie de la responsabilité individuelle.

Utopie ? Préférez-vous le chaos qui se prépare quand les insatisfaits franchiront par leur nombre un seuil critique ? Nous changeons, le monde change autour de nous, la politique ne peut pas rester immuable, sinon de la fracture le sang coulera.

> Article initialement publié sur “Le Peuple des Connecteurs”

> A lire sur le sujet mais avec l’opinion inverse, les articles de Seb Musset: avant le scrutin, et après /-)

> Illustration empruntée à un blog sympa (lulz)

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Régionales? Connais pas. http://owni.fr/2010/03/14/regionales-connais-pas/ http://owni.fr/2010/03/14/regionales-connais-pas/#comments Sun, 14 Mar 2010 17:24:47 +0000 Seb Musset http://owni.fr/?p=10039 le-sesam-pour-voter-the-sesame-to-vote-par-tonio-vega

Jeudi c’est triste. Sur huit parisiens entre 20 et 40 ans croisés dans le bar : 100% d’entre eux n’iront pas voter. Sur fond de bière et de précarité croissante, ça m’a parlé complots, manipulations, risque d’expulsion, applications Heil-Phone, tous pourris, gauche à droite et droite à gauche, la télévision c’est rien qu’une saloperie pour lobotomisés sauf la dernière saison de Docteur Tousse dont j’ai regardé douze épisodes d’affilé.

La campagne pour les élections régionales a t-elle été si médiocre? Des propositions qui valent ce qu’elles valent furent exposées de tous les côtés ainsi que des bilans défendables et défendus. Programme difficilement audibles, peu repris parce que le format média n’est plus au débat mais à la vitesse, à la petite phrase et à l’invective.

Les vaseuses polémiques introduites médiatiquement avec force débilité par le parti gouvernemental d’un côté et la thématique du bouclier régional anti-Monarque de l’autre troublèrent l’observation du fond. Au point que l’on ne sait toujours pas ce qui est où non du ressort de la région.

Le parti du monarque a accentué l’opacité en attaquant par l’intox (comme l’a encore fait ce matin le storm-trooper gominé sur France Inter), la politique régionale des socialistes sur la hausse des impôts et l’insécurité (L’un est le fait des transferts de compétences décidés et non compensées par le gouvernement et compte moins de 10% dans le montant total des impôts locaux – et je ne te parle même pas de la suppression de la taxe pro-, l’autre n’est tout simplement pas du ressort des régions.)

Cette campagne marécageuse des ronds dans l’eau saumâtre, à mi-mandat présidentiel et en plein désarroi national avec total manque de perspective, profite à la montée de l’abstention.

Le PS criera victoire et immédiatement l’UMP relativisera sur les plateaux qu’avec 50% d’abstention cette victoire ne vaut rien. Le monarque capte enfin qu’avec ses gesticulations il a démobilisé son propre campIl est donc dans son intérêt, rapporté à la seule échéance qui l’inquiète, à défaut de séduire, de démobiliser ceux d’en face.

Comme diraient certains salariés gazés en pleine Défense, le mépris est total.

Si tu penses que les responsables politiques sont tous pourris, sois assuré que certains d’entre eux tablent en permanence et, avec succès, sur la médiocrité de tes aspirations et ta constance dans la résignation.

Donc si j’étais toi, dimanche, j’irais voter du mieux que je peux.

Si tu ne le fais pas pour la victoire, fais-le pour la sale défaite.

* * *
Conseil pour après : Les progrès de la médecine et de la forfaiture présidentielle ne pourront rien contre l’érosion naturelle d’une certaine croûte électorale. En revanche, la désertion des pauvres et des jeunes de la sphère démocratique peut maintenir à moindre frais le parti des riches grabataires en orbite sécurito-stationnaire.

> Illustration par
Tonio Vega sur Flickr
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